L''exposition c'était bien passé, non elle s'était même parfaitement bien passé, j'avais fait un peu plus connaissance avec la fameuse Tarana malgré la remarque de Aloysia, qui même si elle était méritée, ne faisait jamais bien plaisir. Mais, bon j'avais changé ces derniers mois & elle ne semblait ne pas l'avoir comprit encore, j'avais certes été un con durant la plus grande partie de ma vie mais, le fait de ne plus coucher avec la première fille venue peut faire changer. Oui, difficile à croire ... C'est pourtant la vérité. Oh & j'avais même réussit à éviter Rhea pendant toute la soirée, je l'avais remarqué dans un coin en train de parler à l'un des photographes qui exposaient ce soir-là, cependant je pense qu'une interruption brutale de la conversation ne m'aurait valu que des reproches & un rapprochement de la part des deux. Paranoïaque ? Je ne dirais pas ça, disons plutôt que j'envisageais toutes les possibilités. Serrant simplement mes poings dans mes poches je n'avais absolument rien fait, continuant ma conversation avec la jeune Tarana. L'envie de m'incruster dans leur conversation avait été forte mais, l'envie de ne pas avoir Rhea à dos l'avait été encore plus. J'étais d'ailleurs partie assez tôt de la soirée, parmi les premiers, avec un peu de chance si je me dépêchais de rentrer & d'aller me coucher je n'aurais même pas la tentation d'aller bousiller un possible rendez-vous de Rhea et si elle rentrait dormir directement, nous n'aurions pas besoin de nous parler. Oui, le principe d'éviter quelqu'un c'est de ne pas lui parler, il était plus simple d'agir ainsi que de devoir m'expliquer avec elle car, la connaissant elle voudrait sûrement savoir la raison de mon comportement dès plus étrange. Même si on arrivait à commencer une conversation, ce sujet finirait toujours par revenir sur le tapis et il faut avouer que cela est normal, comment ne pas l'évoquer quand on vit sous le même toit ? Soupirant longuement, je me prépara à aller dormir, il était encore assez tôt mais, comme j'avais de toute façon j'avais raté le service de ce soir, le seul moyen de me rattraper était d'arriver tôt demain matin & d'avancer au maximum le travail. Je regardais rapidement l'heure & vis qu'il n'était que 23h25, la galerie allait rester ouverte encore trois quart d'heure au minimum, Rhea ne devrait pas arriver avant donc … Un petit sourire traversa mon visage alors que je me levais pour aller chercher mon synthétiseur, je n'avais pas encore eu la chance, et surtout l'argent, pour m'acheter un vrai piano, c'était une de mes envies, seulement l'argent ne pousse pas sur les arbres. L'amenant jusqu'au salon & branchant mon casque dessus, je commençais à laisser courir mes doigts sur le clavier, jouant du Chopin puis une de ses mélodies que j'avais écrite, laissant finalement tomber le casque pour que la mélodie envahisse doucement la pièce, je me laissais bercer par les notes que je jouais. Or quand on commence à jouer, on finit par ne plus voir le temps passer, et je n'entendis même pas la porte d'entrée qui s'ouvrit. Tout ce qui m'importait à l'instant, c'était de pouvoir jouer encore quelques notes de plus.

Une exposition. Tout ce que j’aimais. En tant qu’étudiante en histoire de l’art, je me devais d’être présente. Il fallait dire que, sur cette île, il était plutôt rare d’avoir des évènements de ce genre. Alors, hors de question de rater cela. Habillée d’une manière élégante sans être trop voyante, j’étais arrivée plusieurs minutes en avance à la galerie. Seule, comme toujours depuis quelque temps. Adonis et moi ne parlions plus ou en tout cas, à peine depuis qu’il avait piqué une crise et avait mis un de mes prétendants dehors. Et je vous jure que vivre sous le même toit que quelqu’un qui vous évite comme la peste et à qui vous en voulez, c’est loin d’être évident. Mais malheureusement, il fallait faire avec, et je le voyais si peu souvent que les explications ne venaient pas. J’aurais aimé qu’il me dise ce qui lui était passé par la tête, mais rien à faire. Soi-disant que le mec ne voulait que coucher avec moi, mais je doutais qu’il aurait supporté plusieurs rendez-vous uniquement pour me sauter un soir. Mais soit ! Allez comprendre. Moi, pour l’instant, j’attendais l’occasion de l’avoir face à moi pour une bonne discussion. Parce qu’il m’avait tout de même cassé mon futur couple pour une stupide histoire de coup de sang. Et je lui en voulais un peu, pour ne pas mentir.

La soirée battait son plein et se déroulait bien. J’avais attentivement fait le tour de l’exposition, enregistrant et analysant chaque détail de chaque œuvre. Ma passion… l’art. Peinture, photographies, sculpture et j’en passais. J’adorais cela. J’aurais pu vivre en faisant de la photo, mais je ne m’étais jamais sentie capable de courir les mariages et naissances pour faire des photographies bateau et toujours pareilles. Du coup, j’avais choisi l’histoire. L’histoire de l’art, qui me passionnait quasiment tout autant, qui me permettrait de vivre de ma passion tout en continuant la toute première, la photographie. Bref, tout bénéfice pour moi. Je n’allais certainement pas m’en plaindre.
Le photographe qui exposait vint me parler de son œuvre. Je l’écoutais avec grande attention, néanmoins attirée par le visage tourné d’Adonis qui, clairement, m’évitait sans aucune discrétion. Il parlait à Tarana, une fille que je connaissais depuis un petit temps. Reportant mon attention sur mon interlocuteur, je m’efforçais à ne pas penser à ces conneries d’évitement et de non-explication qu’il y avait entre nous. Après tout, un jour, il n’aurait pas le choix.

Je quittais l’exposition tout à la fin. J’étais dans les toutes dernières, et seuls restaient les responsables et employés de l’exposition. Il était temps de rentrer chez moi, de retrouver mon chiot et la non-présence d’Adonis. Pesant ? C’était le mot, oui. C’était terriblement pesant. Il me manquait. Vraiment.
Je me rendais compte en arrivant chez nous que visiblement, il avait décidé de ne pas s’éloigner des pièces principales : les notes de son clavier résonnaient jusque dehors, et j’entendais déjà la mélodie qu’il jouait avant d’ouvrir pour de bon la porte. J’entrais à l’intérieur sans prendre la peine d’être discrète, mais il ne sembla pas m’entendre. Ou, du moins, peut-être m’ignorait-il, mais il ne leva jamais la tête vers moi. Me débarrassant de ma veste légère, je décidais qu’il était temps. Temps d’avoir une explication. Je m’approchais de la prise où son clavier était branché pour qu’il joue, et tirais un coup sec dessus. Pas fort réglo mais au moins, il n’aurait pas d’autre choix que de s’apercevoir de ma présence. Me redressant, je lui faisais face, bras croisés. « Il faut qu’on parle. » ; Des petits mots simples, directs. Oui, on devait parler. J’avais besoin d’explications, de savoir ce qui lui était passé par la tête. « Parce que là, ça commence à bien faire. » ;